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Les vieilles familles traversent tous les temps, elles en subissent aussi les outrages. Elles perdurent à l’ombre des politiques et des religions, en leur sein parfois. Elles transportent au fil des siècles une part du sacré, du transcendant, de ce qui dépasse l’être mortel.
Mes ancêtres n’ont jamais accordé d’importance aux savoirs. Ils se sont forgés une bibliothèque de la connaissance éprouvée, souvent au péril de leur vie. Par chance de nos jours les bûchers se sont éteints.
Les cinq générations qui m’ont précédé, n’ont eu de cesse à tenir cette bibliothèque à jour, vendant certains livres, en achetant d’autres, au gré des fortunes et revers du destin.
Après-guerre, Émile-Robert de Périnis, mon grand-père, avait fait déplacer la bibliothèque de la crypte noire au dernier étage de cette vieille bâtisse au soixante volets battants bois. La crypte avait protégé les manuscrits de la folie humaine et de son feu, mais le froid et l’humidité des profondeurs décidèrent mon grand-père à dé-crypter l’ensemble des ouvrages. .
L‘ancien salon fumoir du troisième étage fut rebaptiser salon rouge lors d’une étrange cérémonie peuplée de faux visages, soirée de vin, d’excès, de folie et de démesure, une démesure à la hauteur de mon grand-père, un homme à part, homme de nulle part et de partout, à la fois vagabond et sédentaire, si différant, si déroutant et pourtant si proche de chacun d’entre nous.
Suite à cette étrange inauguration, ce temple de la connaissance occulte fut ouvert à tous, sans distinction aucune, être respectueux du lieu, de ses trésors et de ses occupants.
Les préoccupations matérielles ne pénétrant que rarement la sphère temporelle d‘Émile-Robert, le salon rouge malgré son imposante superficie était le seul endroit de la bâtisse à bénéficier d’une température constante été comme hiver. Bien qu’en dehors des soirées il y était formellement interdit de manger, de boire ou de fumer, ce salon devint rapidement le centre culturel, cultuel et point de rassemblement des résidents et invités en la demeure.
C’est ainsi que durant les étés de mon enfance j’ai eu la chance d’approcher l’Âme humaine dans toute sa diversité.
Cette ancien salon-fumoir a la particularité d’avoir en ces opposés des murs porteurs de formes différentes, la moitié sud est une demi-lune qui supporte les hautes fenêtres de la grande tour centrale de la maison-manoriale, quant à la moitié nord, partie de la maison-ancienne elle est de forme rectangulaire, elle supporte l’imposante bibliothèque, à l’abri des rayons du soleil.
Le bureau de mon grand-père, point central de la pièce, posé en équilibre entre l’ombre et la lumière.
Le matériel d’étude cherchait aussi l’équilibre sur cet imposant bureau, équilibre précaire, amas sans dessus dessous, de livres, lettres, papiers, plumes, encres, minéraux, symboles et objets en tous genre. Ce désordre affiché, détonnait avec l’ordre minutieux de la pièce et surtout de la bibliothèque, mais possédait aussi un avantage certain, jamais personne ne se serait risqué à toucher quoi que ce soit, sous peine de voir s’écrouler l’ensemble comme dans un jeux de dominos.
A l’époque ce lieu me fascinait, il me fascine encore aujourd’hui pour des raisons différentes, à présent je perçois le sens parlant du large bureau en noyer sans aucun tiroir secret, le sens signifiant de la bibliothèque à la disposition de tous, et enfin le véritable sens du salon rouge, point central de la propriété, cachant une pièce secrète, renfermant un livre encore plus secret, L‘Ombre de la Main Droite. L‘accomplissement d’un travail sans relâche étalé sur plusieurs vies, celles de mes ancêtres.